sous la direction d’Eric Heyer et de Xavier Timbeau
La croissance annuelle du Produit Intérieur Brut français serait de 0,8% en 2025, après 1,1% en 2024. Pour la zone euro, elle serait de 1,2% en 2025 après 0,8% en 2024.
Graphique PIB en écart à 2019
Synthèse des prévisions, France, International
Croissance1
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Solde Public2
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Taux de chômage3
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Inflation4
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2024 | 2025 | 2024 | 2025 | 2024 | 2025 | 2024 | 2025 | ||
Zone euro | 0,7 | 1,2 | −2,9 | −2,3 | 6,6 | 6,9 | 2,3 | 2,0 | |
Allemagne | -0,0 | 0,8 | −2,1 | −1,4 | 3,5 | 3,9 | 2,4 | 2,0 | |
France | 1,1 | 0,8 | −6,1 | −5,3 | 7,5 | 7,7 | 2,0 | 1,5 | |
Royaume-Uni | 0,9 | 1,2 | −5,0 | −4,3 | 4,3 | 4,7 | 2,6 | 2,2 | |
Etats-Unis | 2,5 | 1,6 | −8,3 | −6,8 | 4,1 | 4,5 | 2,5 | 2,1 | |
Espagne | 2,9 | 2,2 | −3,0 | −2,5 | 11,5 | 11,1 | 2,9 | 2,2 | |
Italie | 0,6 | 0,8 | −4,1 | −3,8 | 6,7 | 6,7 | 1,1 | 2,2 | |
1 Croissance annuelle du produit intérieur brut | |||||||||
2 Solde des Administrations Publiques, fin d'année | |||||||||
3 Taux de chômage en % de la population active, fin d'année | |||||||||
4 Croissance annuelle de l'indice des prix à la consommation |
France
En 2024, pour la France la croissance du PIB est tirée par le commerce extérieur et les dépenses publiques et atteindra 1,1 %, soutenue par l’amélioration des chaînes de production, les Jeux Olympiques et Paralympiques et une politique budgétaire favorable…(plus)…
En revanche, les dépenses des ménages soutiennent peu la croissance, en raison de la baisse de l’investissement immobilier et d’une consommation faible avec un taux d’épargne toujours élevé. Pourtant, quatre ans et demi après la crise du Covid, l’analyse comparative d’avec celle des subprimes permet de mettre en valeur un redressement de l’activité plus favorable en 2024 qu’en 2012.
En 2025, marquée par les évolutions du policy-mix, la croissance est prévu à 0,8 %. Les conséquences des chocs violents connus par l’économie s’estompent progressivement comme le montre le ralentissement de l’inflation qui s’établirait à 1,5% en moyenne sur l’année 2025. L’incertitude politique intérieure devraient peser sur la croissance. L’impact des taux d’intérêt élevés pèsera encore sur la croissance en 2024 (-0,6 point de PIB), mais la baisse attendue des taux de la BCE en 2025 (+0,4 point) stimulerait l’économie en 2025. La politique budgétaire, qui soutient la croissance en 2024 aura un effet largement négatif en 2025 (-0,8 point). Ainsi, le « policy-mix » continuera à peser sur la croissance en 2025, comme en 2024, mais il change de nature.
La consommation des ménages augmentera en 2025 grâce à la baisse du taux d’épargne, mais l’investissement des ménages freine la sortie de crise du secteur de la construction. La consommation des ménages sera ainsi la principale source de croissance. Après deux années de forte inflation, l’année 2024 [a marqué une baisse rapide, aidée par la décrue des prix de l’énergie et atteindra 2 % en moyenne. En 2025, l’inflation se stabiliserait à 1,5 %, avec une contribution négative des prix de l’énergie. Le pouvoir d’achat des ménages repart à la hausse en 2024 mais baisserait légèrement à nouveau en 2025 malgré la baisse de l’inflation en raison de la contraction de l’emploi, du ralentissement de la croissance des prestations sociales, et des baisses des revenus du patrimoine. Le taux d’épargne des ménages commencerait à baisser en 2025 à 17,1 %, poussant à la hausse la consommation, sous l’effet de la baisse de l’inflation et des taux d’intérêt, mais resterait tout de même supérieur de 2,5 points à son niveau pré-crise, représentant 50 milliards d’euros de sur-épargne supplémentaires sur l’année.
L’investissement des entreprises reculerait malgré la baisse des taux conséquence d’une demande atone, de faillites élevées et de hausses de fiscalité dans un contexte politique incertain.
Sur le marché du travail, des pertes d’emploi et une hausse du chômage sont à venir en raison de la croissance faible, de la fermeture progressive du cycle de productivité et de la baisse des exonérations patronales. La politique de l’emploi devrait connaître des économies budgétaires, entraînant une réduction du nombre de bénéficiaires d’emplois aidés. La hausse du taux de chômage devrait atteindre 8,0 % fin 2025.
Du côté des finances publiques, une mauvaise surprise peut en cacher une autre. En 2023, le déficit public français s’élèvait à 5,5 % du PIB et devrait se creuser à 6,1 % en 2024, bien au-dessus des prévisions initiales. Plusieurs facteurs expliquent cette sous-estimation du déficit. Une procédure de déficit excessif a été lancée par l’Union Européenne, rendant difficile l’évitement d’un fort ajustement budgétaire. De plus, l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale a créé une incertitude politique et budgétaire qui a impacté les marchés financiers, avec une augmentation de l’écart de taux (spread) entre les obligations françaises et allemandes. Les mesures budgétaires prévues pour 2025 amélioreraient le solde primaire structurel (hors mesures transitoires) de 1,2 point de PIB, mais le déficit resterait élevé à 5,3 % du PIB, avec une dette atteignant 115,1 % du PIB. Ainsi, le Projet de Loi de Finances (PLF) 2025 marque un tournant budgétaire avec un effort budgétaire primaire estimé à 44 milliards d’euros (1,5 % du PIB) réparti à 60%/40% entre recettes et dépenses publiques.
International
Après une année 2023 marquée par la faible croissance des pays européens, on observe un timide rebond de l’activité au premier semestre 2024…(plus)…
Malgré les mesures budgétaires prises par la plupart des pays à partir de la fin de l’année 2021, pour faire face à la montée des prix de l’énergie, la demande intérieure est restée atone en Europe. Aux États-Unis, la croissance a été au contraire fortement tirée par la consommation des ménages, en lien avec la croissance du revenu disponible des ménages et la baisse du taux d’épargne. Même si le pays a été moins touché par la crise énergétique que les pays européens, la politique budgétaire est restée expansionniste. De plus, même si à partir de 2022, l’activité et l’emploi ont progressivement ralenti outre-Atlantique, les salaires ont augmenté plus rapidement qu’en Europe, ce qui a continué à soutenir le revenu et la consommation des ménages. Enfin, à l’inverse des ménages américains, les Européens n’ont pas puisé dans l’épargne accumulée pendant la période Covid. Malgré cette faible croissance, le taux de chômage de la zone euro est resté stable alors qu’il a augmenté aux États-Unis, ce qui s’explique par une évolution de l’emploi à contre-courant. En effet, le dynamisme de la croissance américaine a reflété l’amélioration de la productivité tandis qu’en Europe, la croissance a certes plus faible mais relativement riche en emplois. En Chine, les signes d’un ralentissement se sont multipliés pendant l’été reflétant les difficultés du secteur immobilier. La croissance chinoise est tirée par l’accélération des exportations, soutenues par une compétitivité-prix favorable et une demande porteuse. Dans la plupart des économies émergentes, le niveau de PIB est certes bien plus élevé qu’en 2019 mais on observe cependant que les rythmes sont inférieurs à ceux qui étaient observés avant la pandémie.
Après les pics atteints au cours de la deuxième moitié de l’année 2022, l’inflation a baissé dans tous les pays, grâce principalement à la fin de la crise énergétique. Le mouvement se poursuit en 2024 et les tensions inflationnistes reculent. L’inflation sous-jacente reste toutefois tirée par la diffusion des hausses passées des prix de l’énergie sur les autres produits lors du processus de production, mais aussi par le renchérissement des coûts salariaux unitaires, s’est accélérée également entre 2020 et le premier semestre 2024. Il reste par ailleurs que mi-2024, les niveaux de prix sont 18 à 25 % plus hauts qu’en 2019 avec des différences d’inflation au sein de la zone euro. Une analyse des contributions à l’inflation montre que le niveau de prix plus élevé en Allemagne s’explique notamment par la part importante du logement, de l’électricité et des combustibles.
En l’absence d’escalade des tensions entre Israël et l’Iran, nous anticipons une stabilisation du prix du baril autour de 80 dollars au dernier trimestre 2024 et en 2025 et une légère baisse du prix du gaz en Europe. Etant données ces hypothèses sur les prix de l’énergie et le scénario de croissance, l’inflation convergerait vers 2 % en Europe et aux États-Unis. L’assouplissement des politiques monétaires pourrait s’accélérer avec la poursuite de la baisse des taux d’intérêt par les banques centrales continueraient donc de baisser les taux d’intérêt.
L’impact de cette baisse sur la croissance ne se matérialiserait cependant pas avant 2025 et il pourrait en outre être en partie atténué par la consolidation des politiques budgétaires. En effet, les chocs successifs de la pandémie puis des hausses de prix énergétiques, ainsi que les mesures de soutien mises en œuvre par les gouvernements, ont donné lieu à une augmentation des déficits et des niveaux de dette publique que les pays européens souhaitent corriger. Malgré une dette publique plus élevée aux États-Unis, aucun des candidats à la Maison Blanche ne prévoit une réduction des déficits budgétaires. Celle-ci serait neutre en 2025 et se traduire par un atterrissage en douceur de la croissance américaine à 1,6 % en 2025 après 2,5 % en 2024 et 2,9 % en 2023.
En 2025, la croissance mondiale devrait changer de moteur avec une accélération en Europe et un atterrissage en douceur aux États-Unis. L’Allemagne peinerait à retrouver le chemin de la croissance au cours du deuxième semestre 2024 mais enregistrerait une accélération de l’activité en 2025 avec une croissance de 0,8. L’Espagne maintiendra une trajectoire de croissance dynamique avec un PIB qui progresserait de 2,9 % en 2024 puis de 2,2 % en 2025. En Italie, le rythme de croissance Italie restera plus élevé qu’avant la pandémie : 0,6 % en 2024 et 0,8 en 2025. Sur l’ensemble de la zone euro, la croissance passerait de 0,5 % en 2023 à 1,2 % en 2025 ce qui ne permettrait pas de compenser le ralentissement américain. La consommation privée devrait être plus dynamique avec un passage de relais des soutiens au revenu des ménages. La progression des salaires dans un contexte désinflationniste soutiendrait le revenu mais cet effet serait en partie amorti par une plus faible contribution de l’emploi ce qui ne permettrait pas d’insuffler un dynamisme compensant le ralentissement américain. Dans les pays émergents, le ralentissement chinois se poursuivrait avec une croissance 4,5 % en 2025. En conséquence, la croissance mondiale serait réduite passant de 3,3 % en 2023 à 3 % en en 2025.
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