Pourquoi rendre le congé de paternité obligatoire ?

par Hélène Périvier

Le gouvernement engage une réflexion sur une réforme du congé de paternité. Un rapport vient d’être demandé à l’Inspection générale des affaires sociales. Aujourd’hui, les pères salariés[1] ont droit à 11 jours calendaires consécutifs au titre du congé de paternité. Indemnisé par la Sécurité sociale dans les mêmes conditions que celles du congé de maternité, le congé de paternité est optionnel. Un allongement de la durée de ce congé est envisagé alors que l’idée de le rendre obligatoire semble être écartée, au vu des déclarations de Marlène Schiappa, Secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de Muriel Pénicaud, Ministre du Travail.

Un levier pour l’égalité professionnelle

Le Policy brief OFCE n°11, publié en janvier 2017, expose les raisons pour lesquelles une réforme du congé de paternité constitue un levier pour réduire les inégalités professionnelles. En matière de partage des congés parentaux, la France est en retard par rapport à d’autres pays européens, et pas seulement les pays nordiques qui ont depuis longtemps mis en place des politiques de congés parentaux obligeant à un partage de ce temps consacré aux enfants. Le Portugal a également innové en la matière : les pères ont droit à un mois de congé de paternité, indemnisé à 100% du salaire, dont deux semaines obligatoires[2].

Obligation et protection des travailleurs

La Ministre du Travail a déclaré le 31 janvier 2018: « Je ne suis pas sûre que l’on change les mœurs d’une société avec une obligation » du recours au congé de paternité. Rappelons que sur les 16 semaines de congé maternité (pour un enfant de rang 1 ou 2), 8 semaines sont obligatoires, dont 6 après la naissance. Cette obligation a été introduite pour protéger les femmes d’une pression que leur employeur pourrait exercer sur elles pour qu’elles ne prennent pas ce congé auquel elles ont droit. Le caractère obligatoire du congé relève donc de la protection des travailleuses[3]. Pourquoi ne pas protéger les pères de la même façon ? Les hommes qui souhaitent consacrer plus de temps à leurs enfants dans le cadre de ce congé peuvent être stigmatisés par leurs collègues ou leurs supérieurs hiérarchiques. L’obligation coupe court à toute négociation. Elle constitue une garantie du respect du droit des travailleurs à prendre le congé de paternité, tout comme l’obligation de congés annuels ou de repos hebdomadaires[4] que personne ne conteste aujourd’hui. Notre histoire sociale montre au contraire que l’obligation est un moyen puissant de changer la norme sociale ; alors pourquoi ne pourrait-elle pas faire bouger les lignes des normes de genre ?

Libre choix individuel et choix de société

Le caractère obligatoire du congé est contesté au nom du libre choix des pères et des couples de s’organiser comme ils l’entendent. La liberté de chacun et de chacune en matière d’organisation familiale est incontestable, mais le caractère sexué de cette organisation au niveau global en fait un problème social et collectif (voir le Policy Brief n°11). Autrement dit, ce qui pose problème, ce n’est pas que des femmes ajustent leur carrière pour consacrer du temps à leurs enfants, c’est que ce soit majoritairement des femmes qui agissent ainsi. De fait, toutes les femmes se trouvent pénalisées par le caractère sexué de la division du travail dans les couples, y compris celles qui optent avec leur conjoint pour une organisation égalitaire. Il s’agit donc d’une externalité négative qu’il convient de corriger.

Indemnisation et perte de revenu

Si le congé de paternité devient obligatoire, alors certains pères verront leurs revenus diminuer pendant la durée du congé. C’est le cas des hommes dont le salaire est supérieur au plafond d’indemnisation de la Sécurité sociale[5] et qui travaillent dans des entreprises ne disposant pas d’une convention collective favorable, qui comporterait une couverture complète par l’employeur. C’est également le cas pour les femmes dans des situations similaires, et pour elles la perte de revenu est plus importante car la durée du congé est plus longue. Revoir l’indemnisation pour qu’elle soit plus généreuse pour les femmes comme pour les hommes est une meilleure réponse à ce problème que de renoncer à l’obligation du recours au congé pour les pères.

Coût de la réforme et financement

Reste la question du coût d’une telle réforme : c’est un point important mais cela ne doit pas couper court à toute discussion. Un congé de paternité allongé à 22 jours et obligatoire impliquerait un surcoût de l’ordre de 500 millions (Policy brief OFCE n°11)[6]. Il doit être pensé à l’aune d’une refonte de l’ensemble des congés et de l’imposition des couples, notamment d’une réforme du quotient conjugal (Allègre et Périvier). Par exemple, un plafonnement du quotient conjugal à 2 500 euros (donc au-dessus du plafond du quotient familial, qui est de 1 500 euros) représenterait un gain pour les finances publiques de 1,35 milliard, ce qui procurait des marges de manœuvre pour ouvrir une réforme des congés et de l’accueil des jeunes enfants. C’est donc l’ensemble des politiques sociales et fiscales qu’il faudrait remettre à plat pour donner plus d’espace aux pères dans la famille et aux femmes dans la sphère professionnelle.

Une réforme du congé de paternité ne saurait suffire à résorber les inégalités persistantes, mais c’est une piste de changement qui permet d’ouvrir un débat sur la place respective des femmes et des hommes dans notre société.

 

 

[1] Pour les travailleurs indépendants, la question dépasse le cas du congé de paternité, c’est l’ensemble du régime de sécurité sociale des indépendants qui est en cause.

[2] Wall Karin, Leitão Mafalda. « Le congé paternel au Portugal : une diversité d’expériences », Revue des politiques sociales et familiales, n° 122, 2016. Exercice de la paternité et congé parental en Europe. pp. 33-50.

[3] Isabel Odul-Asorey, « Congé maternité, droit des femmes ? », La Revue des droits de l’homme [En ligne], 3 /2013,

[4] La date des congés ou le jour de liberté dans la semaine (dimanche ou pas) est le seul sujet de débat, pas l’obligation faite aux entreprises d’accorder un congé à l’ensemble des salarié.e.s.

[5] Le salaire pris en compte ne peut pas dépasser le plafond mensuel de la Sécurité sociale en vigueur lors du dernier jour du mois qui précède l’arrêt, soit 3 311,00 € brut par mois en 2018.

[6] Les indemnités de congés maternité et paternité sont plafonnées. Selon les accords d’entreprises et les conventions collectives, les employeurs peuvent les compléter pour assurer une indemnisation de 100 % à leurs salarié-e-s. Aucune donnée consolidée ne permet d’en évaluer le montant (HCF, 2009). Les coûts présentés ici ne tiennent pas compte du coût que ces réformes entraîneraient pour les employeurs.




Haro sur les investisseurs chinois !

Par Sarah Guillou

Dans son discours de vœux du 15 Janvier 2017, le ministre de l’Economie et des finances, Bruno Le Maire, parle « d’investissements de pillage » suspectant les investisseurs chinois de vouloir « piller » les technologies françaises. Ces déclarations inscrivent le ministre de l’Economie français dans la filiation du patriotisme économique de Colbert à Montebourg, mais cette fois, elles se situent dans un mouvement plus large de méfiance et de résistance aux investissements en provenance de Chine qui parcourt tous les pays occidentaux. Et si le gouvernement français projette d’élargir le champ du décret qui permet de contrôler les investissements étrangers, de nombreux pays en font de même.

La France n’est pas le seul pays à vouloir modifier sa législation pour renforcer les motifs de contrôle des investisseurs étrangers. L’entrée de capitaux étrangers était avant tout perçue comme un apport de moyens financiers et le signe de l’attractivité du territoire. La France a toujours été bien située dans les classements internationaux en termes de terre d’accueil. En 2015, la France se classait au onzième rang mondial au titre des entrées d’investissements directs de l’étranger pour un montant de 43 milliards de dollars en provenance principalement des pays développés (contre 31 milliards pour l’Allemagne et 20 milliards de dollars pour l’Italie). Et comme les investisseurs résidents français ont, eux, investis 38 milliards de dollars à l’étranger (l’Allemagne et l’Italie, 94 et 25 milliards de dollars respectivement), la balance est en faveur des entrées de capitaux productifs qui dépassent les sorties de capitaux.

Cependant, la France s’est toujours distinguée par une méfiance politique plus marquée à l’égard des prises de participation étrangères, surtout lorsqu’il s’agit de ses « fleurons » industriels. Mais voilà que cette méfiance rencontre un écho dans les pays occidentaux à l’égard des investisseurs chinois, et pas seulement outre-Atlantique où l’ensemble des acteurs politiques ont dû se mettre au diapason du patriotisme économique de l’administration Trump. Les investisseurs chinois sont aussi perçus comme des prédateurs par les Allemands, les Anglais, les Australiens, les Italiens pour ne citer qu’eux.

Il faut dire que la stratégie industrielle de la Chine est très volontariste et les stratégies de croissance externe des entreprises chinoises sont soutenues par une politique de montée en gamme et d’acquisition de technologies par tous les moyens. De plus la présence de l’Etat derrière les investisseurs – c’est le propre de la Chine d’avoir une imbrication forte des intérêts privés et publics et une forte présence de l’État dans l’économie en raison de son passé communiste – crée de potentiels conflits de souveraineté. Enfin, la Chine menace de plus en plus des secteurs dans lesquels les pays occidentaux croyaient détenir des avantages technologiques, ce qui inquiète les gouvernements (voir le Policy Brief de l’OFCE de S. Guillou (n° 31, 2018), « Faut-il s’inquiéter de la stratégie industrielle de la Chine ? »). Enfin, la Chine n’est de son côté pas exemplaire en matière de réception des investissements étrangers érigeant des barrières et des contraintes souvent associées à des transferts de technologie.

Les pays occidentaux réagissent donc en augmentant le champ du contrôle : aux questions de sécurité nationale et d’ordre public sont ajoutées les technologies stratégiques et la propriété des bases de données concernant les citoyens. En France, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a annoncé vouloir l’étendre au stockage de données numériques et à l’intelligence artificielle. En Allemagne, l’acquisition de Kuka, fabricant de robots industriels par le chinois Midea a conduit à renforcer le contrôle allemand et notamment au refus du rachat du fabricant de semi-conducteurs Aixtron.

Aux Etats-Unis, c’est bien au motif de l’acquisition de données bancaires que le rachat de MoneyGram par Ant Financial – une émanation d’Alibaba – a conduit le CFIUS (Committee on Foreign Investment of the United States) à émettre un avis négatif très récemment. Le projet européen de la création d’une commission identique au CFIUS n’a pas encore abouti et il ne suscite pas l’adhésion de tous les membres de l’UE tant certains accueillent avec bienveillance les investisseurs chinois.

Cette politique est, sinon coordonnée, au moins commune parmi les principaux récipiendaires des investissements chinois. La France n’est pas la seule à tenir cette position. Une telle unanimité du clan occidental est rare mais elle comporte aussi des risques.

Le premier est celui de l’isolationnisme : trop de barrières conduisent à renoncer à des opportunités de partenariats, en certains domaines, de plus en plus incontournables, et à des opportunités de renforcement des entreprises occidentales. Le second est le risque de contournement des interdictions de prises de participation par les investisseurs chinois. Les acquisitions ne sont pas toujours hostiles et les entreprises en voie d’acquisition sont souvent prêtes à des partenariats qui prendront d’autres formes. Ainsi l’échec du rapprochement d’Alibaba avec l’américain MoneyGram est contrebalancé par de nombreux accords que l’entreprise a scellé avec des partenaires européens ou américains pour faciliter les paiements des touristes chinois et notamment pour permettre d’utiliser la plateforme de paiement Alipay. Elle scellera certainement un partenariat de ce type avec MoneyGram. Ces partenariats conduisent à des transferts de technologie et des partages de compétences, voire de données, sans la contrepartie des apports de capitaux. Le troisième est le déversement des capitaux chinois en Asie et/ou en Afrique par exemple permettant la capture de marchés et de ressources qui handicaperont les acteurs occidentaux. Il faudra bien que le capital chinois disponible s’investisse. L’absence d’acteurs occidentaux partenaires impliquera une perte de contrôle et un isolement qui pourraient s’avérer préjudiciables.

Il faut donc revenir à un contrôle retenu bien qu’exigeant mais absent d’un raisonnement dichotomique qui a prévalu aux déclarations, sinon aux intentions du ministre. Tant que les technologies françaises seront attractives, il faudra s’en réjouir et mesurer les avantages et les inconvénients des alliances. Peu d’années s’écouleront avant que les technologies chinoises deviennent aussi attractives que les françaises. Et les Chinois ne manqueront pas de venir rappeler à Monsieur Le Maire sa position.




L’indicateur avancé : la reprise sur de bons rails

par Hervé Péléraux

La publication ce jour des indicateurs de confiance dans les différentes branches confirme l’optimisme des chefs d’entreprise interrogés par l’INSEE en janvier. Quoiqu’en léger repli ce mois, le climat général des affaires reste proche de son sommet de fin 2007, au-dessus de son pic de rebond de début 2011.

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À partir de cette information qualitative, l’indicateur avancé anticipe une croissance de +0,6 % successivement au quatrième trimestre 2017 et au premier trimestre 2018. Si ces prévisions se réalisaient, l’économie française aurait alors aligné 6 trimestres consécutifs de croissance supérieure à +0,5 % depuis la fin 2016. Selon l’indicateur, la croissance sur l’ensemble de l’année 2017 atteindrait +1,9 % et l’année 2018 démarrerait avec un acquis de croissance de +1,5 %. Notons cependant qu’une inconnue subsiste au premier trimestre 2018 avec un alourdissement transitoire des prélèvements liés à la bascule cotisations sociales / CSG et à la hausse de la fiscalité écologique et du tabac, alors que les mesures de soutien au pouvoir d’achat joueront plutôt dans la seconde moitié de l’année. Ces facteurs, auxquels on peut ajouter les conditions climatiques exceptionnelles de l’hiver 2017/2018 avec des températures clémentes qui limitent les dépenses en chauffage, pourraient donner à l’activité un profil trimestriel un peu plus heurté que celui déduit des enquêtes de conjoncture qui décrivent plutôt une trajectoire sous-jacente comme ce fut le cas ces dernières années.

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Trading à haute fréquence et régulation économique, un arbitrage inéluctable entre stabilité et résilience des marchés financiers

par Sandrine Jacob Leal et Mauro Napoletano

Au cours des dernières décennies, le trading à haute fréquence (THF) a fortement augmenté sur les marchés américains et européens. Le THF représente un défi majeur pour les autorités de régulation du fait, d’une part, de la grande variété de stratégies de trading qu’il englobe (AFM, 2010 ; SEC, 2010) et d’autre part des incertitudes qui planent toujours autour des avantages nets de cette innovation financière pour les marchés financiers (Lattemann et al., 2012 ; ESMA, 2014 ; Aguilar, 2015). Par ailleurs, bien que le THF ait été identifié comme l’une des causes probables des krachs éclairs (Jacob Leal et al., 2016), aucun consensus n’a encore réellement émergé sur les causes fondamentales de ces phénomènes extrêmes. Certains pays ont déjà décidé de réguler le THF[*]. Cependant, les approches adoptées jusqu’à présent varient en fonction des régions.

Les problèmes mentionnés ci-dessus renvoient directement au débat sur la régulation économique et son efficacité face aux effets néfastes du THF et des krachs éclairs. Nous contribuons à ce débat dans un nouvel article publié dans la revue Journal of Economic Behavior and Organization, dans lequel nous étudions l’effet d’un ensemble de mesures de régulation au travers d’un modèle multi-agents dans lequel les krachs éclairs émergent de façon endogène (Jacob Leal et Napoletano, 2017). Contrairement à notre précédant modèle (Jacob Leal et al., 2016), nous endogénéisons cette fois l’annulation des ordres caractéristique du THF. Ce modèle est ensuite utilisé comme un laboratoire afin d’étudier l’effet sur les marchés d’un certain nombre de mesures de régulation économique visant le THF. Notre modèle est particulièrement adapté et pertinent dans ce cas car, contrairement aux travaux existants (par exemple, Brewer et al., 2013), il est capable de générer de façon endogène les krachs éclairs, résultat des interactions entre les traders basse fréquence et les traders haute fréquence. Par ailleurs, nous examinons dans ce travail un plus grand nombre de mesures que les travaux existants. Notre objectif étant d’étudier l’effet des mesures de régulation proposées et mises en œuvre en Europe et aux États-Unis face à la montée du THF. La liste comprend des mesures relatives à la microstructure des marchés (comme les « circuit breakers »), des mesures de type « command-and-control » (comme les temps de garde des ordres minimaux) et les mesures qui influencent les incitations des traders (comme les frais d’annulation ou la taxe sur les transactions financières).

Après avoir vérifié la capacité de notre modèle à reproduire les principaux faits stylisés des marchés financiers, nous avons analysé l’efficacité des mesures de régulation économique susmentionnées.

Ainsi, nos résultats démontrent que les tentatives afin de réduire la fréquence d’activité des traders à haute fréquence, en les empêchant par exemple d’annuler fréquemment et rapidement leurs ordres à travers des temps de garde des ordres minimaux ou des frais d’annulation, ont des effets bénéfiques sur la volatilité des marchés et sur les krachs éclairs. Par ailleurs, nous montrons que l’introduction d’une taxe sur les transactions financières produit des résultats similaires (bien que l’ampleur des effets soit moindre) puisque cette mesure décourage le THF.

En résumé, ces mesures qui permettent d’imposer une limite à la vitesse du trading s’avèrent être des instruments efficaces pour réduire la volatilité des marchés et l’occurrence des krachs éclairs. Ces résultats confirment les conjectures de Haldane (2011) quant à la nécessité de s’attaquer à la «course effrénée» des traders HF afin d’améliorer la stabilité financière.

Cependant, nous constatons que ces mesures de régulation engendrent également une plus longue durée des krachs éclairs.

Par ailleurs, nos résultats révèlent que la mise en œuvre des circuit breakers a des effets mitigés. D’une part, l’introduction de circuit-breaker ex ante réduit nettement la volatilité des prix et supprime totalement les krachs éclairs. Ce résultat s’explique par le fait que ce type de mesures permet une intervention en amont de la chute brutale des prix, source du krach. D’autre part, les circuit breakers ex post n’ont aucun effet sur la volatilité des marchés et le nombre des krachs éclairs mais augmentent la durée des krachs éclairs.

En conclusion, nos résultats indiquent qu’en matière de régulation économique du HFT, il y a un arbitrage inéluctable entre la stabilité et la résilience du marché. Ainsi, nous démontrons que les mesures de régulation qui améliorent la stabilité du marché – en termes de volatilité moindre et d’incidence des krachs éclairs – impliquent également une détérioration de la résilience du marché – en termes de capacité réduite du prix des titres à se rétablir rapidement après un krach. Cet arbitrage s’explique par le double rôle joué par le THF dans les dynamiques de notre modèle. En effet, d’une part, le THF s’avère jouer un rôle fondamental à l’origine des krachs éclairs, du fait notamment des larges fourchettes de cotation créées ponctuellement et de la concentration de leurs ordres à la vente. D’autre part, le THF contribue à rétablir rapidement la liquidité du marché favorisant ainsi la reprise du prix des titres à la suite d’un krach.

[*] Certaines actions et enquêtes sans précédent de la part des régulateurs locaux ont été largement rapportées dans la presse (Le Figaro, 2011; Les Echos, 2011; 2014; Le Monde, 2013; Le Point, 2015).

 




Sur la double nature de la dette

par Mattia Guerini, Alessio Moneta, Mauro Napoletano, Andrea Roventini

Les crises financière et économique de 2008 ont été fortement liées à la dynamique de la dette. En fait, une étude de Ng et Wright (2013) rapporte qu’au cours des trente dernières années, toutes les récessions américaines avaient des origines financières.

La figure 1 montre que les dettes des entreprises privées non financières (ligne verte) et les prêts immobiliers (ligne bleue) ont augmenté régulièrement aux Etats-Unis depuis les années 1960 et jusqu`à la fin du XXe siècle. De plus, dans les années 2000, la dette liée au prêts immobiliers est passée d’environ 60% à 100% du PIB en moins d’une décennie. Cette situation est devenue insoutenable en 2008 avec l’explosion de la bulle des crédits hypothécaires (les subprime). Ensuite les prêts immobiliers ont fortement diminué tandis que le ratio dette publique / PIB des États-Unis (ligne rouge) est passé de 60% à un niveau légèrement supérieur à 100% en moins de 5 ans, comme conséquence de la réponse de la politique budgétaire à la Grande Récession.

IMG1_post24-01La forte croissance de la dette publique a suscité des inquiétudes par rapport la soutenabilité des finances publiques et, aussi, sur les possibles effets négatifs de la dette publique sur la croissance économique. Certains économistes ont même avancé l’idée d’un seuil de 90% dans le rapport dette publique/PIB, en dessus duquel la dette publique nuirait à la croissance du PIB (voir Reinhart et Rogoff, 2010). Malgré un grand nombre d’études empiriques contredisant cette hypothèse (voir Herdon et al., 2013 et Égert, 2015 comme exemples récents), le débat entre les économistes est toujours ouvert (voir Ash et al., 2017 et Chudik et al., 2017).

Nous avons contribué à ce débat dans un document de travail (voir Guerini et al., 2017), qui sera publié prochainement dans la revue Macroeconomic Dynamics. Dans cette contribution, nous étudions conjointement l’impact de la dette publique et privée sur la dynamique du PIB américain en exploitant de nouvelles techniques statistiques que nous permettent d’identifier les relations causales entre les variables reposant seulement sur la structure des données[1]. Cela nous a permis de garder une perspective « agnostique » dans l’identification de la causalité et donc plus robuste par rapport aux possibles restrictions suggérées par telle ou telle théorie économique et donc en « laissant parler les données ».

Les résultats obtenus suggèrent que les chocs de dette publique affectent positivement et durablement la production (voir la figure 2, panneau de gauche)[2]. En particulier, nos résultats apportent des preuves contre l’hypothèse selon laquelle la croissance de la dette publique diminue la croissance du PIB aux États-Unis. En effet, nous trouvons que l’augmentation de la dette publique, entraînée par une augmentation des dépenses publiques en investissements, génère aussi des hausses dans les investissements privés (voir la figure 2, à droite) confirmant à cet égard, les conjectures effectuées par Stiglitz (2012). Cela implique que les dépenses publiques et, plus généralement, la politique budgétaire expansionniste stimulent la production à court et à moyen terme. Il en ressort que les politiques d’austérité ne semblent pas être la réponse politique appropriée pour surmonter une crise.

IMG2_post24-01Au contraire, nous ne trouvons pas des effets positifs significatifs liés à une augmentation de la dette privée, et en particulier lorsque l’on se concentre sur la dette liée aux prêts immobiliers. Plus précisément, nous constatons que les effets positifs des chocs sur la dette privée ont une taille plus faible que ceux sur la dette publique, et qu’ils disparaissent avec le temps. En outre, l’augmentation des niveaux de la dette hypothécaire a un impact négatif sur la dynamique de la production et de la consommation à moyen terme (voir la figure 3), tandis que leurs effets positifs ne sont que temporaires et relativement légers. Un tel résultat semble correspondre pleinement aux résultats de Mian et Sufi (2009) et de Jordà et al. (2014): une croissance excessive des prêts immobiliers alimente les bulles réelles d’actifs, mais lorsque ces bulles éclatent, elles déclenchent une crise financière, qui transmet visiblement ses effets négatifs au système économique réel sur un horizon de temps long.

IMG3_post24-01Un autre fait intéressant qui ressort de nos recherches est que l’autre forme la plus importante de dette privée – à savoir la dette des sociétés non financières (SNF) – ne génère pas d’impacts négatifs à moyen terme. En effet (comme on peut le voir dans la figure 4), l’augmentation du niveau d’endettement des SNF semble avoir un effet positif à la fois sur le PIB et sur la formation brute de capital fixe.

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En conclusion, nos résultats suggèrent que la dette a une double nature : différents types de dettes ont un impact différent sur la dynamique macroéconomique agrégée. En particulier, les menaces possibles sur la croissance de la production à moyen et long terme ne semble pas provenir de la dette publique (qui pourrait bien être une conséquence d’une crise), mais plutôt d’une augmentation excessive du niveau de la dette privée. En outre la croissance de la dette liée au prêts immobiliers semble être beaucoup plus dangereuse que celle liée aux activités d’investissement et de production des entreprises non financières.

 

[1] En particulier, nous utilisons un algorithme de recherche causale basé sur l’analyse ICA (Independent Component Analysis) pour identifier la forme structurelle de la VAR cointégrée et résoudre le problème de la double causalité. Pour plus de détails sur l’algorithme ICA, voir Moneta et al. (2013). Pour plus de détails sur ses propriétés statistiques, voir Gourieroux et al. (2017).

[2] Lors du calcul des fonctions de réponse impulsionnelle, nous appliquons un choc de Déviation Standard (DS) à la variable de dette concernée. Ainsi, par exemple, sur l’axe des y de la figure 2, panneau de gauche, on peut lire qu’un choc de 1 DS à la dette publique a un effet positif de 0,5% sur le PIB à moyen terme.




Quel rôle pour le bilan des banques centrales dans la conduite de la politique monétaire ?

par Christophe Blot, Jérôme Creel et Paul Hubert

En ajustant la taille et la composition de leur bilan, les banques centrales ont profondément modifié leur stratégie de politique monétaire. Bien que la mise en œuvre de ces mesures ait été initialement envisagée pour une période de crise, la question se pose désormais de l’utilisation du bilan comme instrument de politique monétaire en dehors des périodes de crise.

La politique d’achats de titres effectués par les banques centrales s’est traduite par une augmentation considérable de la taille de leur bilan. En septembre 2017, les bilans de la Réserve fédérale et de la BCE s’élevaient respectivement à près de 4 500 Mds de dollars (soit 23,3 % du PIB des Etats-Unis) et 4 300 Mds d’euros pour la BCE (38,5 % du PIB de la zone euro), alors qu’ils étaient de 870 Mds de dollars (soit 6,0 % du PIB) et 1 190 Mds d’euros (soit 12,7 % du PIB) en juin 2007. La fin de la crise financière et de la crise économique plaide pour un resserrement progressif de la politique monétaire, déjà entamé aux Etats-Unis et à venir dans la zone euro. Ainsi, la Réserve fédérale a augmenté le taux d’intérêt directeur à cinq reprises depuis décembre 2015 et a commencé à réduire la taille de son bilan en octobre 2017. Toutefois, aucune indication précise n’a été donnée sur la taille du bilan des banques centrales une fois que le processus de normalisation aura été achevé. Au-delà de la taille se pose la question du rôle de ces politiques de bilan pour la conduite de la politique monétaire à venir.

Initialement, les mesures prises pendant la crise devaient être exceptionnelles et temporaires. L’objectif était de satisfaire un large besoin de liquidités et d’agir directement sur les prix de certains actifs ou sur la partie longue de la courbe des taux, lorsque l’instrument standard de politique monétaire – le taux d’intérêt de très court terme – était contraint par le plancher à 0% (ZLB pour Zero lower bound). L’utilisation de ces mesures pendant une période prolongée – depuis dix ans – suggère cependant que les banques centrales pourraient continuer à utiliser leur bilan comme instrument de politique monétaire et de stabilité financière, y compris en période dite « normale », c’est-à-dire lorsqu’il existe des marges de manœuvre pour baisser le taux directeur. Non seulement, ces mesures non conventionnelles ont démontré une certaine efficacité mais, en outre, leurs mécanismes de transmission ne semblent pas spécifiques aux périodes de crise. Leur utilisation pourrait donc à la fois renforcer l’efficacité de la politique monétaire et améliorer la capacité des banques centrales à atteindre leurs objectifs de stabilité macroéconomique et financière. Nous développons ces arguments dans une publication récente que nous résumons ici.

Dans un article présenté en 2016 lors de la conférence de Jackson Hole, Greenwood, Hanson et Stein suggèrent que les banques centrales puissent utiliser leur bilan pour fournir des liquidités afin de satisfaire un besoin croissant du système financier pour des actifs liquides et sans risque. Les réserves excédentaires ainsi émises augmenteraient le stock d’actifs sûrs mobilisable par les banques commerciales, renforçant la stabilité financière. Les banques centrales pourraient également intervenir plus régulièrement sur les marchés afin de modifier le prix de certains actifs, les primes de risque ou les primes de terme. Ici, il ne s’agit pas forcément d’accroître ou de réduire la taille du bilan, mais de moduler sa composition afin de corriger d’éventuelles distorsions ou de renforcer la transmission de la politique monétaire en intervenant sur l’ensemble des segments de la courbe des taux. Pendant la crise des dettes souveraines, la BCE a lancé un programme d’achats de titres publics (SMP pour Securities Market Programme) qui avait pour but de réduire les primes de risques apparues sur les rendements de plusieurs pays (Grèce, Portugal, Irlande, Espagne et Italie) et d’améliorer la transmission de la politique monétaire commune vers ces pays. En 2005, le Président de la Réserve fédérale s’étonnait d’une énigme sur les marchés obligataires, constatant que les taux longs ne semblaient pas réagir au resserrement en cours de la politique monétaire américaine. Le recours à des achats ciblés de titres sur des maturités plus longues aurait sans doute permis d’améliorer la transmission de l’orientation de la politique monétaire telle qu’elle était souhaitée à cette époque par la Réserve fédérale.

En pratique, la mise en œuvre d’une telle stratégie en période « normale » soulève plusieurs remarques. D’une part, si les politiques de bilan complètent la politique de taux, les banques centrales devront accompagner leurs décisions d’une communication adaptée précisant à la fois l’orientation globale de la politique monétaire ainsi que les raisons justifiant l’utilisation de tel ou tel instrument et à quelle fin. Il semble qu’elles aient su y parvenir pendant la crise alors qu’elles multipliaient les programmes ; il n’y a donc pas de raison d’imaginer que cette communication devienne subitement plus difficile à mettre en œuvre en période « normale ». Par ailleurs, l’utilisation plus fréquente du bilan comme instrument de politique monétaire se traduirait par une plus large détention d’actifs et potentiellement d’actifs risqués. Il y aurait dans ces conditions un arbitrage à réaliser entre l’efficacité à attendre de la politique monétaire et les risques pris par la banque centrale. Notons aussi que l’utilisation du bilan n’implique pas que la taille de celui-ci croisse en permanence. Les banques centrales pourraient tout aussi bien faire le choix de vendre certains actifs dont le prix serait jugé trop élevé. Cependant, pour être en capacité de moduler effectivement la composition des actifs de la banque centrale, encore faut-il que son bilan soit suffisamment élevé pour faciliter les opérations de portefeuille de la banque centrale.

Il faut reconnaître que les économistes n’ont pas encore complètement analysé les effets potentiels des politiques de bilan sur la stabilité macroéconomique et financière. Mais cette incertitude ne devrait pas empêcher les banques centrales de recourir à des politiques de bilan, car seule l’expérience peut fournir une évaluation complète du pouvoir des politiques de bilan. L’histoire des banques centrales nous rappelle que les objectifs et les instruments utilisés par les banques centrales ont régulièrement évolué[1]. Un nouveau changement de paradigme semble donc possible. Si les politiques de bilan permettent de renforcer l’efficacité de la politique monétaire et d’améliorer la stabilité financière, les banques centrales devraient sérieusement réfléchir à leur utilisation.

Pour en savoir plus : Christophe Blot, Jérôme Creel, Paul Hubert, « What should the ECB “new normal” look like? », OFCE policy brief 29, 20 décembre.

[1] Voir Goodhart (2010).




Fin de partie pour les contrats aidés

par Bruno Ducoudré

L’été 2017 a été marqué, sur le plan des politiques de l’emploi, par un changement de stratégie majeur du nouveau gouvernement par rapport au précédent quinquennat. La nouvelle politique de l’emploi donne désormais la priorité à la formation et à l’accompagnement des jeunes NEET (Not in Education, Employment or Training – ni en étude, emploi, ou stage) et des chômeurs les plus éloignés du marché du travail, et délaisse les contrats aidés comme outil de traitement du chômage. Cette nouvelle stratégie s’est opérée en deux temps. Premièrement le gouvernement a annoncé cet été qu’il n’y aurait pas de rallonge pour les contrats aidés au deuxième semestre et que le nombre de contrats prévus pour 2018 serait en forte baisse par rapport aux années précédentes. Puis le Plan Investissement Compétences (PIC), prévoyant notamment 15 milliards d’euros dédiés à la formation professionnelle sur cinq ans, a été présenté à la presse le 25 septembre. Dans ce billet, nous précisons quel devrait être l’effet de la baisse des contrats aidés sur l’emploi à partir du deuxième semestre 2017, effet pris en compte dans le dernier exercice de prévision de l’Ofce d’octobre 2017 pour 2017-2019.

La baisse programmée des contrats aidés

Le quinquennat précédent a été marqué par une progression des contrats aidés, avec notamment la création des Emplois d’avenir et l’allongement de la durée des Contrats uniques d’insertion – Contrats d’accompagnement dans l’emploi (CUI-CAE) (graphique 1). Ainsi, en 2013-2014, face à la dégradation du marché du travail, 380 000 contrats aidés dans le secteur non-marchand avaient été signés en moyenne chaque année (360 000 en moyenne sur 2012-2016). La montée en charge des emplois d’avenir, dont la durée moyenne était de 2 ans, ainsi que l’allongement de la durée des CUI-CAE avec pour objectif une durée moyenne des contrats de 10,5 mois contre 7 mois en 2012, avaient permis une forte progression du stock d‘emplois en contrat aidé. Le pic des contrats aidés a été atteint au deuxième trimestre 2016, que l’on considère les contrats aidés dans le non-marchand seuls (307 000 en stock) ou que l’on inclut l’Insertion par l’activité économique (IAE) et les contrats aidés du secteur marchand (540 000 en stock). Par la suite, le nombre d’emplois en contrat aidé a légèrement diminué, avec la baisse entamée du stock des Emplois d’avenir pour le secteur non-marchand et des Contrats uniques d’insertion – Contrats initiative emploi (CUI-CIE) dans le secteur marchand. Au deuxième trimestre 2017, on comptait 476 000 contrats aidés en France métropolitaine, dont 292 000 dans le secteur non-marchand, 135 000 dans l’IAE et 49 000 dans le secteur marchand.

L’été 2017 a marqué une rupture brutale avec les années précédentes. Alors que 280 000 contrats aidés ont été votés dans la Loi de finances 2018, une partie importante de l’enveloppe annuelle a été consommée sur le premier semestre. Une rallonge conséquente (généralement votée en Loi de finances rectificative) aurait donc été nécessaire pour stabiliser le stock de contrats aidés atteint à la fin juin 2017. Le gouvernement en a décidé autrement avec une rallonge de 30 000 contrats aidés, ciblés uniquement sur le secteur non-marchand, actant ainsi une baisse rapide du stock de contrats aidés dans ce secteur (-50 000 contrats aidés en stock prévus au second semestre 2017) et la fin des entrées en contrats aidés dans le secteur marchand.

Graphe_post12-12Cette forte baisse des contrats aidés se prolongera en 2018. Cela se traduit dans le Projet de loi de finance (PLF) pour 2018 par 200 000 contrats aidés prévus exclusivement dans le secteur non-marchand sous la forme de CUI-CAE dont la durée serait de 10,2 mois en moyenne, avec un taux de prise en charge par l’État qui baisserait à 50% contre environ 70% en 2017 (Tableau 1). Les Emplois d’avenir marchands et non-marchands disparaîtront ainsi que les CUI-CIE. Pour 2019, nous avons fait l’hypothèse de maintien du stock de CUI-CAE à son niveau prévu fin 2018. Par ailleurs, et à contre-courant de la baisse prévue sur les autres types de contrats aidés, les dispositifs d’insertion par l’activité économique bénéficieraient d’une rallonge de 10 000 contrats en 2018, que nous avons maintenue pour 2019.

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Des effets négatifs à court terme sur l’emploi

Compte tenu de ces éléments, le stock de contrats aidés baisserait fortement entre la fin 2017 et la fin 2019 (cf. graphique 1 et Tableau 1 : –86 000 contrats aidés non-marchands, –123 000 contrats aidés y compris secteur marchand et IAE). L’effet cumulé sur 2017-2019 de la baisse du stock de contrats aidés conduirait à réduire le nombre d’emplois de 86 000. Cet effet négatif s’explique principalement par le faible effet d’aubaine des contrats aidés non-marchands contrairement au secteur marchand (0,3 retenu pour les CUI-CAE, 0,4 pour les Emplois d’avenir, 0,84 pour les CUI-CIE et 0,75 pour les Emplois d’avenir du secteur marchand)[1].

Concernant l’alternance, en attendant la réforme à venir, le gouvernement a fixé pour 2018 un objectif de hausse de 2% du nombre d’entrées en apprentissage et nous avons retenu une hypothèse de stabilisation du stock de contrats de professionnalisation en prévision. L’effet sur l’emploi serait négligeable en prévision (+2 000 emplois cumulés entre 2017 et 2019).

Les autres dispositifs d’emplois aidés voient la fin de l’exonération de cotisation chômage sur les embauches de jeunes en CDI à compter du 1er octobre 2017 (entrée en vigueur de la nouvelle convention d’assurance chômage de l’Unedic) ainsi que la suppression du contrat de génération dès 2018. L’aide aux chômeurs créateurs d’entreprise serait en revanche étendue progressivement à partir de 2019[2]. Nous avons inscrit 200 000 bénéficiaires supplémentaires en 2019. Enfin, nous avons stabilisé en prévision les bénéficiaires de l’accompagnement des restructurations, ainsi que les dispositifs ciblés sur les territoires. Ces derniers devraient être toutefois rediscutés en 2019 avec l’allègement supplémentaire de cotisations sociales au niveau du SMIC[3]. Au total, les politiques de l’emploi, via les contrats aidés et les autres dispositifs d’emplois aidés, contribueraient négativement à l’évolution de l’emploi total pour –98 000 emplois sur la période 2017-2019. Ce chiffrage indiqué dans le tableau 1 ne tient toutefois pas compte d’un possible effet de l’extension de l’Accre (Aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise) sur l’emploi[4], ni de l’effet positif attendu du Plan d’investissement compétences sur l’amélioration de l’employabilité des jeunes et des chômeurs de longue durée : compte tenu de la montée en charge des formations et de la Garantie jeunes, et de l’effet attendu sur le retour à l’emploi de ces dispositifs[5], le Plan d’investissement compétences pourrait contribuer positivement à l’emploi en 2018-2019 (+54 000 emplois).

La nouvelle orientation des politiques de l’emploi devrait donc avoir un effet négatif à court terme sur l’emploi total, l’effet négatif de la forte baisse des contrats aidés entre le deuxième semestre 2017 et la fin d’année 2018 n’étant que partiellement compensé par la montée en charge progressive de Plan d’investissement compétences.

 

[1] Pour plus de détails, voir « Les contrats aidés : quels objectifs, quel bilan ? », Dares Analyses, n° 21, mars 2017.

[2] Suivant le PLF 2018, l’exonération de cotisations sociales « Aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise » (ACCRE) sera étendue dès 2019 à l’ensemble des travailleurs indépendants qui créent ou reprennent une activité, pour un coût de 200 millions d’euros » et pourrait bénéficier à terme à 350 000 créateurs ou repreneurs d’entreprise supplémentaires.

[3] Les allègements supplémentaires rendraient ces dispositifs non incitatifs.

[4] Cet effet pourrait toutefois être négligeable. Cf. Redor, D., « L’aide à la création d’entreprises a-t-elle un impact sur leur survie ? Une évaluation pour quatre cohortes d’entreprises créées par des chômeurs en France », Économie et Statistique, n° 493, 2017.

[5] L’effet de la formation sur l’emploi est calculé en appliquant une élasticité de retour à l’emploi de 0,07 sur le différentiel d’entrées en formation par rapport aux entrées constatées en 2015 (660 000 entrées). Cf. Card, D., Kluve, J., & Weber, A. (2017), « What works? A meta analysis of recent active labor market program evaluations », Journal of the European Economic Association, jvx028. L’effet de la Garantie jeunes sur l’emploi est calculé en retenant un impact de 9 % sur le taux d’emploi durable (CDI et CDD de 6 mois et plus hors emplois aidés) sur le nombre de jeunes entrant dans le dispositif chaque année. Cf. Tableau 2.2, p. 22 dans Dares, 2016 : « Premiers résultats d’évaluation statistique de l’impact de la Garantie jeunes – Annexe 5 », novembre.




Contrats courts : toutes les taxes ne se valent pas

par Bruno Coquet, OFCE et IZA

Les contrats courts sont utiles au bon fonctionnement de l’économie, mais en France leur développement combiné à leur raccourcissement (graphique 1) coûte cher à l’ensemble des agents économiques, alors même que la minorité d’entreprises qui en font un usage intensif ne supporte qu’une fraction marginale de ce coût.

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L’expérience montre qu’en France l’usage des contrats courts n’a pas été restreint par une réglementation juridique considérée comme particulièrement stricte. Il apparaît raisonnable de penser que si les employeurs utilisent massivement des contrats courts, ce n’est probablement pas parce qu’ils y sont contraints, mais parce qu’ils y ont intérêt. Il devient dès lors clair que c’est sur l’équation économique des entreprises utilisatrices qu’il faudrait chercher à peser, et non sur le droit. La théorie économique incline d’ailleurs à moduler le prix des différents contrats de travail en fonction des externalités qu’ils engendrent.

L’Etat pourrait donc taxer les contrats courts, mais l’intérêt de l’assurance chômage à moduler la tarification de ces contrats est encore plus fort et immédiat. En effet, l’assurance chômage est en première ligne face à ces changements, et ses règles ont beaucoup évolué pour mieux assurer les contrats courts s’y adapter. Mais l’assureur est confronté à un paradoxe : bien assurer les contrats courts crée des subventions croisées qui incitent à leur développement. Un fonctionnement optimal de l’assurance requiert donc aujourd’hui de moduler le prix des contrats de travail.

Différents leviers existent pour tarifer les contrats de travail, mais tous ne se valent pas : l’objectif doit être clair, et l’instrument approprié pour l’atteindre. Tous ne sont pas non plus adaptés aux problèmes français, qui appellent une règle lisible, légère à administrer, applicable à tous les contrats de travail et tous les secteurs (sans exception, y compris public), incitant les employeurs à faire des choix économes des deniers de l’assurance ; la tarification doit être contemporaine des comportements coûteux, mais ni punitive ni symbolique, n’augmentant pas le coût du travail, et ne visant pas à renflouer l’Unedic.

Dans un document de travail de l’OFCE, nous décrivons ces différents instruments de modulation du prix des contrats de travail, leurs avantages et inconvénients, dans l’absolu et par rapport à la situation française. Une taxe modulée par secteurs, et plus encore une taxe modulée par entreprise, apparaissent toutes deux inadaptées à résoudre le problème des contrats courts tel qu’il se présente actuellement en France. Elles pourraient même être contre-productives.

La cotisation dégressive en fonction de la durée du contrat de travail, assortie d’un forfait et d’une franchise, apparaît la formule la plus adaptée pour assurer la survie de l’assurance chômage dans un marché du travail marqué par l’usage croissant de contrats de travail toujours plus courts. Il est souhaitable d’assortir cette formule d’un système de forfait, destiné à réduire les incitations à créer des contrats extrêmement courts, et d’une franchise, destinée à ne pas peser sur le coût du travail des petites entreprises, notamment celles qui sont en forte croissance.

Nos simulations illustrent que des paramètres finement négociés peuvent déboucher sur un équilibre satisfaisant pour toutes les parties prenantes.

Pour en savoir plus : Bruno Coquet, La tarification des contrats courts : objectifs et instruments Sciences Po OFCE Working Paper, n°29, 2017-12-08.




Réunion de l’OPEP : beaucoup de bruit pour rien ?

par Céline Antonin

Le 30 novembre 2017, les pays membres de l’OPEP ont décidé de prolonger de neuf mois, jusqu’à décembre 2018, leur accord de 2016 prévoyant un plafonnement de production avec des quotas par pays. D’autres pays producteurs associés à l’accord, Russie en tête, ont décidé de continuer à coopérer en prolongeant également leur accord de baisse de production.

Etant très attendu et anticipé par le marché, cet accord n’est pas une surprise. D’autant que derrière l’unité affichée, il a mis en exergue des divergences entre pays : d’un côté, la position très modérée de la Russie, qui a traîné des pieds pour signer l’accord ; de l’autre, la position volontariste de l’Arabie saoudite de reprendre un management plus actif des cours, après plusieurs années de relâchement. Les pays pétroliers sont toujours partagés entre d’un côté, la volonté de soutenir les cours et d’équilibrer leurs finances publiques, et de l’autre, la crainte constante de se voir voler des parts de marché par l’inexorable montée en puissance du pétrole de schiste étatsunien. Etant donnée cette double contrainte, et la situation de progressif rééquilibrage entre offre et demande dans les deux prochaines années, nous considérons que le pétrole devrait évoluer autour de 59-60 dollars le baril pour 2018 et 2019.

Certes, la demande mondiale continue de progresser, portée par les pays émergents et les États-Unis, mais l’offre globale demeure abondante (tableau 2). Dans notre prévision d’octobre 2017, nous avions anticipé un maintien des quotas jusqu’en mars 2018 ; nous l’avons prolongé jusqu’en décembre 2018, ce qui se traduit par une offre légèrement moins abondante en 2018 (-0,2 Mbj par rapport à la prévision d’octobre 2017).

Le retour à un management actif depuis fin 2016

Depuis 2014, sous l’impulsion de l’Arabie saoudite, les pays de l’OPEP ont laissé perdurer, voire tacitement encouragé une situation d’offre abondante, dans le but de maintenir des prix bas et d’évincer une partie de la production non-conventionnelle américaine, afin de garantir ses parts de marché. Pourtant la position du royaume saoudien a changé fin 2016 : d’abord, la stratégie offensive vis-à-vis du pétrole de schiste américain n’a pas vraiment porté ses fruits, et la production s’est poursuivie à un rythme soutenu. En outre, la forte baisse des prix a fortement dégradé les finances publiques saoudiennes. Le déficit public est ainsi passé de 3,4 % du PIB en 2014 à 15,8 % en 2015, puis 17,2 % en 2016. Par ailleurs, l’Arabie saoudite cherche à moderniser son économie et à privatiser l’entreprise étatique pétrolière, Saudi Aramco, et pour cela, elle a besoin d’un pétrole plus cher et plus rentable.

Pour tenter de faire remonter les prix du baril, les pays de l’OPEP ont mobilisé à l’extérieur du cartel, en associant plusieurs autres pays non membres, notamment la Russie. Deux accords de baisse de production ont été conclus fin 2016[1], conduisant à une baisse concertée de près d’un million de barils par jour (Mbj) pour les membres de l’OPEP et de 0,4 Mbj pour les autres producteurs (tableau 1). Ces accords ont-ils été respectés et ont-ils permis de faire remonter les prix ? Pas réellement. Un an après l’accord, les pays concernés respectent certes à hauteur de 80 % les plafonds de production, mais de façon très inégale. Ce retrait d’1,3 Mbj du marché n’a pas eu d’impact fort sur les prix, pour quatre raisons :

  1. D’abord, le fait que la référence retenue pour établir les baisses de production ait été le niveau d’octobre 2016, à savoir un niveau élevé pour plusieurs pays ;
  2. Par ailleurs, trois pays de l’OPEP ont été « épargnés » par les baisses de production. L’Iran s’est ainsi vu accorder un plafond de production de 4 Mbj (0,3 Mbj de plus qu’en octobre 2016), pour lui permettre de retrouver son niveau d’avant les sanctions occidentales. De même, la Libye ou le Nigéria n’ont pas été soumis à un plafond de production, or ils ont connu une forte hausse de production entre octobre 2016 et juillet 2017 (460 000 barils par jour pour la Libye et 190 000 barils par jour pour le Nigéria) ;
  3. En outre, la production des pays hors OPEP a continué sa progression dynamique : la production des États-Unis a ainsi augmenté de 1,1 Mbj entre octobre 2016 et juillet 2017, et celle du Brésil de 0,3 Mbj, ce qui a largement contrebalancé la baisse de la production russe (-0,3 Mbj) ou mexicaine (-0,1 Mbj) ;
  4. Enfin, les stocks demeurent à des niveaux élevés : ils représentent 102 jours de demande aux États-Unis et 99 jours de demande dans les pays de l’OCDE.

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L’accord du 30 novembre 2017 ne change pas la donne

Alors que les deux accords de 2016 prévoyaient de limiter la production jusqu’en mars 2018, avec possibilité d’extension, l’OPEP a décidé de l’étendre de 9 mois supplémentaires, jusqu’en décembre 2018. Par ailleurs, la Libye et le Nigéria, auparavant épargnés par l’accord, ont également été intégrés. En réalité, le marché reflétait déjà cette information dans les cours, et l’impact s’est avéré relativement limité (5 à 7 dollars par baril de Brent). En revanche, la réunion du 30 novembre a permis de mettre en lumière des divergences croissantes entre les deux principaux protagonistes, Arabie saoudite et Russie. La Russie a montré une réticence croissante à l’extension de l’accord, qui s’explique par plusieurs facteurs : d’abord, plusieurs nouveaux gisements pétroliers russes devaient être mis en service et devront être reportés, ce qui mécontente les producteurs. De plus, en raison d’un régime de change flottant, une remontée du prix du pétrole contribuerait à un rouble fort et dégraderait la compétitivité du pays. Enfin, la Russie craint que la remontée du prix du baril n’encourage la production de pétrole de schiste américain et n’affaiblisse ses parts de marché. Par conséquent, l’unité affichée lors de cet accord est fragile, et toutes les options sont sur la table lors de la prochaine réunion de l’OPEP en juin 2018. En outre, le respect des quotas pourrait être mis à mal avant même cette échéance.

La production américaine : principale clef de voûte de la production mondiale

En 2018, l’évolution de la production américaine sera particulièrement cruciale : par sa progression dynamique, cette dernière a permis, notamment depuis 2014, d’éviter une flambée du prix du baril. Le nombre de foreuses pétrolières en activité progresse depuis le point bas de mai 2016, mais se situe très en dessous du niveau de 2014 (graphique). Cependant, grâce à des techniques de forage plus efficaces qui permettent de se concentrer sur les zones les plus productives des gisements (sweet spots), la production de chaque nouveau puits augmente. En outre, les coûts de production et d’investissement ont baissé : les coûts de production se situent autour de 40 dollars d’après le US Bureau of Labor Statistics, soit une baisse de 35 % depuis fin 2014 ; quant aux dépenses d’investissement en amont, elles représentent moins de 15 dollars par baril produit (contre 27 dollars en 2014). Enfin, selon les chiffres de l’EIA, les dépenses d’investissement pétrolier ont représenté 67 milliards de dollars au deuxième trimestre 2017, soit une croissance de 4 % en glissement annuel. Cela motive notre hypothèse de hausse de production à hauteur de 0,6 Mbj en 2018 et en 2019.

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Vers un équilibre offre-demande en 2018-2019

Nous anticipons une croissance soutenue de la demande mondiale (+1,3 Mbj en 2018 et +1,4 Mbj en 2019), sous l’effet des pays émergents (Chine et Inde notamment). La demande chinoise représenterait 0,4 Mbj supplémentaires par an, soit un tiers de la hausse globale. Du côté de l’offre, le dynamisme vient de la croissance de l’offre non OPEP, qui augmenterait de 1 Mbj chaque année, de 2017 à 2019. En 2017, le supplément d’offre de l’Amérique du Nord représenterait 0,8 Mbj, dont 0,6 Mbj pour les États-Unis et 0,2 Mbj pour le Canada. Le Kazakhstan et le Brésil contribueraient à la hausse à hauteur de 0,2 Mbj chacun. La production baisserait en revanche au Mexique (-0,2 Mbj) et en Chine (-0,1 Mbj). Le scénario serait identique en 2018 et 2019. L’Iran a le potentiel pour augmenter sa production d’au moins 0,2 Mbj, et certains pays pourraient légèrement relâcher leur contrainte, ce qui nous conduit à inscrire une hausse de 0,2 Mbj de la production OPEP en 2018.

Des risques pesant sur l’offre ne peuvent cependant être exclus. Parmi les risques haussiers, citons la probabilité d’une baisse plus marquée et concertée de production de l’OPEP, un nouveau bras de fer entre les États-Unis et l’Iran, ou encore des regains de tension au Nigéria ou en Libye. Les risques baissiers sont quant à eux liés à la poursuite de l’accord OPEP : si l’OPEP décide de ne pas reconduire l’accord ou que son respect est limité en raison d’intérêts nationaux trop divergents, alors les prix pourraient baisser davantage.

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[1] Les deux accords de baisse de production conclus fin 2016 sont l’accord du 30 novembre 2016 (accord de Vienne) entre pays de l’OPEP, qui prévoit le retrait de 1,2 Mbj du marché par rapport à octobre 2016, et l’accord du 10 décembre 2016 réunissant des pays non membres de l’OPEP, et entérinant une baisse de production de 0,55 Mbj.




La reprise s’affirme

par Hervé Péléraux

Avec la publication par l’INSEE d’une croissance du PIB de +0,5 % au troisième trimestre 2017, l’économie française aligne désormais 4 trimestres consécutifs de croissance supérieure à la croissance potentielle (estimée à 1,2 % l’an, soit 0,3 % par trimestre), signant véritablement, depuis la fin de l’année 2016, l’entrée en phase de reprise.

Cette meilleure donne macroéconomique transparaît dans les enquêtes de conjoncture et laissent présager la poursuite du mouvement de reprise engagé au quatrième trimestre 2016. Les enquêtes, qui fournissent une information qualitative sur la perception qu’ont les chefs d’entreprises et les ménages de leur propre situation et des décisions qu’elle sous-tend, se situent nettement au-dessus de leur moyenne de longue période et continuent à progresser (graphique 1).

IMG1_post07-12Donnée par construction sous forme de soldes d’opinions, l’information qualitative issue des enquêtes peut être convertie en une information quantitative. À cette fin, on estime une équation économétrique reliant le taux de croissance trimestriel du PIB et un résumé, utile pour cet objectif, de l’information contenue dans les soldes (pour une présentation de la méthodologie des indicateurs de l’OFCE, voir « L’indicateur avancé pour la zone euro »). L’indicateur, qui présente un profil nettement plus lissé que le taux de croissance du PIB, ne parvient pas à décrire pleinement la volatilité de l’activité et de ce fait ne doit pas être considéré comme un prédicteur au sens strict de la croissance trimestrielle (graphique 2). Par contre, d’un point de vue plus qualitatif, il parvient à décrire assez correctement les phases pendant lesquelles la croissance est, de manière prolongée, supérieure ou inférieure à la croissance moyenne ou de long terme (la constante de régression), proche du concept de croissance potentielle[1]. Dès lors, l’indicateur peut être vu comme un indicateur de retournement du cycle économique.

IMG2_post07-12Le mauvais chiffre de croissance du deuxième trimestre 2016 n’apparaît nullement dans les enquêtes de conjoncture et dans leur conversion en taux de croissance du PIB. L’écart important entre l’estimation et la réalisation, qui pourrait à première vue être considéré comme une défaillance de l’indicateur, est plutôt le signe que la rechute de la croissance au deuxième et au troisième trimestre 2016 a été accidentelle sous l’effet de facteurs ponctuels négatifs (la mauvaise production agricole, la baisse de la fréquentation touristique liée aux attentats, les inondations, les grèves dans les raffineries). Cette rechute ne préfigurait en tout cas pas un retournement durable de l’activité et la croissance a rejoint le rythme estimé par l’indicateur au quatrième trimestre 2016 (+0,5 %) pour reproduire la même performance au premier et au deuxième trimestre 2017 (tableau 1). À partir des données d’enquêtes disponibles jusqu’en décembre, la croissance escomptée par l’indicateur resterait supérieure à +0,5 % au quatrième trimestre 2017 et accélérerait à +0,7 % au premier trimestre 2018. Si ces prévisions se réalisaient, l’économie française aura alors aligné 6 trimestres consécutifs de croissance supérieure ou égale à +0,5 %.

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[1] La croissance de long terme considérée ici n’est pas la croissance potentielle estimée par ses déterminants structurels au moyen d’une fonction de production, mais la moyenne du taux de croissance du PIB sur l’intervalle de temps considéré telle qu’elle ressort de l’estimation avec des régresseurs centrés-réduits. Des ruptures de cette croissance de long terme ont été introduites pour répliquer le ralentissement de la croissance potentielle mis en évidence par d’autres méthodes d’estimation.