Observe-t-on une amélioration de la production industrielle en mai ? Une réponse à partir de l’analyse de la consommation d’électricité

par Eric Heyer

En indiquant une chute de plus de 21 %, les chiffres de la production dans l’industrie manufacturière pour le mois d’avril, publiés par l’INSEE le 10 juin, ont douché l’espoir entretenu par les enquêtes de la Banque de France d’un effondrement de moindre ampleur par rapport au mois de mars.

Ce résultat en forte baisse est en revanche en ligne avec l’analyse que nous faisions le mois dernier à partir de la consommation totale d’électricité en France. Une fois purgée des effets saisonniers, des jours fériés, des aléas météorologiques (écart entre la température journalière et la normale saisonnière) et des gains d’efficacité énergétique, il apparaissait très clairement que la consommation d’électricité observée depuis le début du confinement se situait très en deçà de sa valeur attendue, dont la raison pourrait être une moindre utilisation des équipements productifs. Sur la base d’une relation économétrique, nous avions anticipé une baisse de l’IPI de plus de 18 %, confirmant le caractère inédit de la crise depuis la création de cet indice et infirmant tout début d’amélioration de la situation dans l’industrie en avril (graphique 3).

Les données (Réseau de Transport d’électricité), observées au cours du mois de mai indiquent que cette consommation est restée, malgré le déconfinement, encore très nettement inférieure à celle attendue en période normale d’activité (graphique 1).

Agrégée en donnée mensuelle, la consommation d’électricité a été inférieure de près de 15 % par rapport à une « situation normale » en mai contre 18 % en avril (graphique 2)

Une fois corrigée de ses composantes non conjoncturelles, la consommation d’électricité permet d’expliquer une partie des variations de l’indice de production industrielle (IPI). Sur la période 2010-2019, nous avons estimé un modèle statique reliant l’IPI et la consommation d’électricité[1].

Sur la base de ce modèle économétrique, nous pouvons tenter d’estimer de façon anticipée l’IPI du mois de mai 2020 qui sera publié le 10 juillet 2020 (Graphique 3). D’après nos estimations, ce dernier pourrait connaître une hausse de 8 %. L’industrie tournerait alors à 70% de sa capacité d’avant la crise (graphiques 3). 



[1] Cette relation entre l’IPI et la consommation d’électricité a été estimée par la méthode DOLS (Dynamic Least Squares), le nombre de lag et de lead étant déterminé à l’aide du critère Akaike.

1 Comment

  1. Bonjour,
    Merci pour cette analyse TRES utile. Une remarque et une question :
    – la remarque: sur les axes des ordonnées des graphs, peut-être serait-il mieux d’indiquer directement les % plutôt que les valeurs en 0.x ?
    – Question: « situation normale » = le même jour ? moyenne du mois ? de l’année ? et comment expliquez-vous les fortes variations observées avant le confinement (seulement par les jours fériés et similaires ? auquel cas, il faudrait peut-être « lisser » le(s) graph(s) pour le(s) rendre plus clair).
    merci

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