par Eric Heyer
Après seulement 15 jours de confinement, la production dans l’industrie manufacturière avait chuté de plus de 18 % au mois de mars. Auparavant, la plus forte baisse jamais enregistrée par l’INSEE était de 6 % en novembre 2008. Cette chute historique confirme, après la publication de la croissance du PIB au premier trimestre, l’ampleur inédite des conséquences de cette pandémie et des mesures sanitaires sur l’industrie française.
Comme nous l’avions indiqué dans un post précédent, cette baisse s’observe également dans la consommation totale d’électricité en France. Une fois purgée des effets saisonniers, des jours fériés, des aléas météorologiques (écart entre la température journalière et la normale saisonnière) et des gains d’efficacité énergétique, il apparaît très clairement que la consommation d’électricité observée depuis le début du confinement se situe très en deçà de sa valeur attendue, dont la raison pourrait être une moindre utilisation des équipements productifs.
Les données (Réseau de Transport d’électricité), observées au cours du mois d’avril indiquent que cette consommation est restée inférieure à celle attendue en période normale d’activité (graphique 1).
Agrégée en donnée mensuelle, la baisse observée au mois d’avril est la plus importante jamais enregistrée au cours de la période analysée (graphique 2) : en avril 2020, la consommation d’électricité a été inférieure de près de 18 % par rapport à une « situation normale ».
Une fois corrigée de ses composantes non conjoncturelles, la consommation d’électricité permet d’expliquer une partie des variations de l’indice de production industrielle (IPÏ). Sur la période 2010-2019, il existe une relation de long-terme – cointégration – entre l’IPI et la consommation d’électricité[1].
Sur la base de cette relation économétrique, nous pouvons tenter d’estimer de façon anticipée l’IPI du mois d’avril 2020 qui sera publiée le 10 juin 2020. D’après nos estimations, ce dernier pourrait connaître, comme au mois de mars, une baisse d’environ 18 %, confirmant le caractère inédit de la crise depuis la création de cet indice (graphique 3).
Compte tenu du fait que l’ensemble du mois d’avril a été sous confinement contre 15 jours au mois de mars, une nouvelle baisse mensuelle de 18% ne serait pas le signe d’une chute de moindre d’ampleur comme indiqué par les enquêtes de la Banque de France.
Cette chute après seulement 6 semaines de confinement équivaudrait à une baisse déjà deux fois supérieure à celle observée au cours des huit trimestres de la Grande Récession (graphiques 4).
L’intégration
dans un modèle économétrique estimant le PIB indique qu’une telle baisse de
l’IPI correspondrait à une chute de près de 5 % du PIB mensuel, impact
comparable à l’hypothèse retenue dans l’évaluation
de l’OFCE du 20 avril 2020.
[1] Cette relation de cointégration a été modifiée par rapport au post précédent qui intégrait également l’emploi industriel. Dans l’analyse qui suit, la relation de cointégration entre l’IPI et la consommation d’électricité a été estimée par la méthode DOLS (Dynamic Least Squares), le nombre de lag et de lead étant déterminé à l’aide du critère Akaike.
Bonjour
Avez-vous travaillé plus généralement sur la relation PIB et consommation d’énergie ou consommation d’électricité pour estimer les variations de court terme de croissance?
Merci
Dominique MEZIERE